4 heures du matin

Ci-dessus - Musubu Hagi : Comme un esprit clair, 2022
Musubu Hagi : Comme un esprit clair, 2022

 

C'est un moment de la journée qui n'existe pas vraiment. Un moment mythique. Trop tard pour être encore debout, trop tôt pour sortir du lit. Un moment que la plupart des gens connaissent rarement. C'est pourquoi 4 heures du matin ont une importance capitale dans la narration. L'auditeur aura une réaction quasi physique lorsqu'il entendra l'heure diminuer. Pour la plupart, les seuls repères temporels possibles sont extrêmes. 

Les autres moments de la journée peuvent être rationalisés, triés et classés avec la multitude d'autres événements typiques de leur créneau horaire. Mais pour la plupart des gens, 4 heures du matin est une période où l'on peut puiser dans un réservoir d'expériences bien peu profond. Le stress, l'épuisement et l'ivresse sont les plus courants. 

Vous compatissez avec quelqu'un forcé de se lever à 4 heures du matin pour prendre l'avion, et vous souffrez de l'endurance nécessaire lorsqu'on raconte une longue soirée en ville qui, bien sûr, se termine à 4 heures du matin. L'heure précise à laquelle ces événements se sont déroulés importe peu. Était-ce un réveil à 4 h 20 ? La soirée s'est-elle terminée vers 3 h 40 ? Non, bien sûr que non. Il était 4 heures du matin. 

Il y a quelques semaines, j'ai moi aussi frôlé la mythique 4 h du matin. C'était la fin de l'été à Montréal. Des amis étaient venus de l'extérieur et, inutile de le dire, les choses se sont enchaînées. Je me suis retrouvé devant un club récemment fermé, à préparer un brunch auquel personne ne croyait vraiment. 

Les seuls véhicules dans la rue étaient des taxis, mais j'ai opté pour une marche de 30 minutes jusqu'à la maison pour me dégriser. En parcourant les rues résidentielles désertes, j'ai été surpris par le calme qui m'envahissait. Chaque appartement que je croisais était rempli de Montréalais endormis dans leurs lits douillets. J'avais l'impression de n'avoir rien à faire, nulle part où aller, si ce n'est chez moi. Mon esprit était fatigué et vide. Un pas devant l'autre.

Il n'est pas étonnant que les moines zen soient invités à faire leur première méditation avant le lever du jour, ni que tant d'athlètes professionnels commencent leur entraînement à l'aube. C'est parce que c'est plus facile. Pas la moindre distraction. 

L'ironie, c'est que si, comme moi, vous avez connu des nuits agitées et un sommeil médiocre, vous avez tendance à ressentir le contraire. Au lieu de la lucidité, 4 heures du matin symbolisent la tension, où les erreurs passées s'accumulent et où les ennuis du lendemain gâchent une bonne nuit de sommeil. 

L'objectif est de garder à l'esprit l'état réel du monde. Tout le monde est au lit et il n'y a rien à faire. L'esprit devrait être aussi vide qu'une promenade à 4 heures du matin dans une rue résidentielle. 

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